L’un des premiers opéras de l’histoire de la musique, Orféo, fut, selon les spécialistes, joué à Mantoue devant la cour ducale le 24 février 1607 pour l’ouverture du carnaval qui devait précéder l’entrée en carême. Il est signé du grand compositeur Claudio Monteverdi. Ce spectacle complet reprend l’histoire d’Orphée qui ayant perdu Eurydice sa bien-aimée, piquée par des serpents le jour de son mariage, descend jusque dans le royaume de Pluton, le dieu des enfers, pour tenter de la ramener sur la terre. Au commencement de l’acte III, Orphée, accompagné de l’Espérance, parvient au bord du Styx, le fleuve infernal. L’Espérance lui annonce qu’elle doit alors le quitter sur le terrible seuil. En effet, une loi de l’empire infernal est inscrite dans le bronze : « Lasciate ogni speranza O voi che entrate… » (« Abandonnez toute espérance, Ô vous qui entrez… »)

Cet abandon tragique de l’espérance au seuil du royaume des morts est caractéristique du monde païen. Le christianisme proclame, au contraire, que le Christ est descendu jusque dans les enfers (= le royaume de la mort) et qu’il en a brisé les portes pour libérer ceux qui en étaient captifs. Désormais, l’espérance peut nous guider jusque dans le Royaume des cieux car la mort a été vaincue par celui qui est la Vie et qui est venu remplir la mort de sa présence. « O Mort, où est-elle ta victoire ? Où est-il ton aiguillon ? » proclame Saint Paul dans la première lettre aux Corinthiens (15, 55). Désormais, nous ne devons plus abandonner notre espérance devant la mort car nous savons que celle-ci est vaincue par le Christ.

Ainsi le temps qui nous prépare à la victoire pascale, ce temps du carême, qui s’ouvre devant nous, n’est-il pas un temps de désespoir ou de tristesse. Il est au contraire le temps que se donne l’Église pour apprendre à vivre avec l’espérance, cette vertu théologale qui nous dirige avec assurance vers notre fin, la béatitude. Mais comme toutes les vertus, si elle nous est donnée par le Seigneur, nous devons consentir à la recevoir et à en vivre. C’est la raison pour laquelle ces cinq semaines nous sont données comme entraînement. Par la prière, le jeûne (les mercredis et vendredis sont jours d’abstinence et le mercredi des cendres et le vendredi saint sont jours de jeûne) et le partage, nous pouvons nous décentrer de nos préoccupations habituelles, nous arracher à nos craintes et nous orienter, poussés par l’espérance, vers la joie de Pâques.

Dans notre paroisse Saint Vincent des Vignes, les propositions seront nombreuses pour vivre ce carême. En plus des temps que la liturgie nous donnera (messes et adorations, temps de confessions etc.) nous proposons 5 soirées de carême (tous les vendredis de mars de 20h15 à 22h) pour nous tourner vers le Ciel. Nous y entendrons des témoignages variés, nous nous tournerons vers le Seigneur dans l’adoration et nous vivrons le partage en offrant à des associations caritatives un peu de notre bien.

Pendant ce carême, ces 5 semaines d’entraînement à l’espérance et à la charité, nous aurons à cœur de porter dans nos prières ceux qui se préparent au baptême (jeunes et adultes) et qui vivront les dernières étapes de leur parcours catéchuménal par la célébration des scrutins qui les aideront à vivre le combat spirituel. Nous serons en Église à leur côté pour les assister et vivre avec eux la joie de leur nouvelle naissance dans la fête de Pâques.

Remplis d’espérance et déjà assurés de notre victoire dans le Christ, nous pouvons faire nôtre cette invitation de l’antienne du mercredi des cendres : « les yeux levés vers Jésus-Christ, entrons dans le combat de Dieu. »

Abbé Hervé Godin,  Curé de la paroisse Saint Vincent des Vignes.